La loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole (DDADUE) a été promulguée au Journal Officiel le 23 avril 2024. L’article 37 de la loi prévoit la mise en conformité avec le droit européen des dispositions relatives aux congés payés.
Article 37 de loi portant diverses dispositionsd’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances,de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matièreagricole
Le 13 septembre 2023, la Chambre sociale de la Cour de cassation a sanctionné la non-conformité des dispositions du code du travail en matière d’acquisition des congés payés pendant les arrêts de travail liés à un accident du travail ou une maladie professionnelle, ou à un accident ou une maladie non professionnelle.
Le 15 novembre 2023, la Cour de cassation a saisi le Conseil constitutionnel d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur la conformité à la constitution la notion de travail effectif du salarié et l’acquisition des congés payés.
Dans sa décisiondu 08 février 2024 la Conseil constitutionnel a considéré que les dispositions du code du travail qui sont fondées sur une différence de situation ne méconnaissent pas le principe d’égalité devant la loi, pas plus que le droit à la protection de la santé ni aucun autre droit ou liberté garantis par la Constitution.
Dans le prolongement de cette décision, le Gouvernement a saisi le Conseil d’Etat d’une demande d’avis portant sur la mise en conformité avec le droit de l’Union européenne des dispositions du code du travail en matière d’acquisition de congés pendant les périodes d’arrêt maladie.
Le Conseil d’Etat a rendu son avisle 13 mars 2024 ce qui a conduit le gouvernement a déposé le 15 mars 2024 un amendement dans le cadre du projet de loi DDADUE.
Le projet de loi DDADUE a été adopté par le Sénat le 09 avril et par l’Assemblée nationale le 10 avril 2024 et a été publié au Journal Officiel le 23 avril 2024.
L’article 37 de la loi prévoit la mise en conformité avec le droit européen des dispositions du code du travail relatives aux congés payés. Ces dispositions visent à sécuriser les entreprises tous secteurs confondus, en prévoyant :
- Pour l’avenir :
— L’acquisition de 24 jours au maximum pour les salariés en arrêt de travail pour maladie non professionnelle.
— Permettre aux salariés en arrêt de travail pour AT/MP, d’acquérir des droits à congés payés (2,5 jours ouvrables par mois), sans limitation de durée.
— L’obligation pour l’employeur d’informer le salarié dans le mois qui suit son retour d’arrêt pour maladie ou accident (professionnel ou non) sur ses droits à congés, notamment au moyen du bulletin de paie.
— A compter de la notification de l’employeur concernant la prise des congés, le salarié disposerait d’un délai de report de 15 mois. Ce délai peut être augmenté par accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par convention ou accord de branche.
- Pour le passé :
— Le salarié dispose d’un délai de 2 ans, qui commence à courir à compter de la publication de la loi, pour réclamer les congés qui ont été acquis au cours des périodes d’arrêt maladie depuis le 1er décembre 2009, dans la limite de 24 jours par période de référence (1er avril-31 mars pour le bâtiment).
Le texte ne prévoit pas de dispositions particulières s’agissant des salariés dont les contrats de travail ont été rompus lors de l’entrée en vigueur de la loi. Dans son avis du 13 mars 2024, le Conseil d’Etat a rappelé que le droit commun en matière d’indemnité compensatrice de congés payés s’appliquait : à savoir 3 ans à compter de la rupture du contrat de travail.
Ainsi, l’article 37 met le droit français en conformité avec le droit européen, sans surtransposition :
- Pour l’avenir, les dispositions contenues dans des dispositions de l’article 37 permettent d’éviter les accumulations illimitées de droits à congés lorsque le contrat de travail est suspendu, en raison de la maladie ou de l’accident, depuis au moins un an :
- Le report des droits à congés acquis au cours d’une période de maladie (qu’il s’agisse d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ou non professionnelle) peut débuter à la fin de la période d’acquisition des droits. La durée du report est alors limitée à 15 mois, qui peut être augmentée par accord de branche ou d’entreprise. A l’issue de cette période, si le salarié n’a pas soldé ses congés, ils seront définitivement perdus.
- Lorsque le salarié revient dans l’entreprise, postérieurement à la période de référence mais avant l’expiration de la période de report de 15 mois, le point de départ de la fraction restante de cette période de report est la date à laquelle l’employeur a informé le salarié sur le nombre de jour de congés dont il dispose et la date à laquelle ces jours de congés peuvent être pris. L’information doit être communiquée au salarié dans le mois qui suit la reprise du travail par tout moyen conférent date certaine à leur réception, notamment au moyen du bulletin de paie.
Concrètement, deux hypothèses peuvent être envisagées :
- Soit le salarié reprend le travail avant l’expiration de la période de report de 15 mois, celle-ci serait suspendue jusqu’à ce que l’employeur remplisse son obligation d’information sur les droits à congés payés du salarié et la date jusqu’à laquelle il peut les prendre.
- Soit le salarié reprend le travail au terme de la période de 15 mois et il perdrait alors ses droits à congés payés acquis au titre d’un AT/MP ou de la MNP.
- Pour le passé, l’amendement réduit la portée de la jurisprudence de la Cour de cassation :
- Lorsque le salarié est encore lié à son employeur, le droit d’agir du salarié pour bénéficier des congés acquis (droit à repos) en vertu d’une maladie non professionnelle serait limité à 2 ans à compter de l’entrée en vigueur de la loi.
- Dans le cas où le salarié n’est plus lié à son employeur, la prescription triennale de droit commun prévue par le Code du travail (et non reprise dans l’amendement) aux actions en paiement d’indemnité compensatrice de congés payés ferait obstacle aux actions des salariés ayant quitté leur employeur depuis plus de 3 ans.